Dans les strates du temps

Samedi 21 septembre 2019. 18h00. Le public était invité au musée de l’Arche pour un compte-rendu des fouilles archéologiques effectuées cette année à l’Anse à Henry dans la foulée des premières études sur site menées de 1999 à 2004 par Sylvie LeBlanc de l’université Laval et des travaux de Jean-Louis Rabottin, alors professeur d’histoire au lycée de Saint-Pierre. Une quarantaine de personnes aura fait le déplacement, ce qui constituait une belle assistance, motivée et attentive. Saint-Pierre et Miquelon avec l’Anse à Henry « le site arctique le plus méridional » de préciser le spécialiste de l’université Laval qui assurait la présentation, le point le plus sud où se rendaient les paléo-esquimaux. En cela l’archipel apporte une originalité à l’ensemble français, avec en perspective d’autres lieux à identifier sur les 242 km² que comportent nos îles.

A l’anse à Henry sans doute n’y avait-il pas des occupations permanentes des lieux mais des « patches de population » depuis la période de l’archaïque maritime, car il y avait là un espace riche de protéines, le Colombier tout proche, ce qui aura donné lieu à des « pulsations de fixation » sur quatre phases authentifiées. De nombreux vestiges ont été mis à jour, taillés le plus souvent dans la rhyolite. La source d’approvisionnement en matière première a été trouvée ces jours derniers au Caillou rouge, ce qui constitue une belle découverte.

Les travaux de recherche menées conjointement par des chercheurs de l’université de Rennes et de l’université Laval au Québec vont se poursuivre l’an prochain. Le temps presse car l’érosion en ce site unique notamment pour ce qu’il révèle du Dorsétien (de -500 avant l’ère commune – j’aime utiliser cette appellation, autrement appelée av JC – à 1500.

Toute une effervescence de vie et de sociétés dynamiques antérieure à la découverte de nos îles par João Álvares Fagundes en 1520 et bien sûr la venue de Jacques Cartier en 1536.

Il est tant de pages d’une Histoire humaine diversifiée dans notre environnement géographique spécifique vers lesquelles mettre le cap. Les chercheurs présents lors de cette présentation auront su enchanter notre avidité de meilleure compréhension de ce qui touche à notre espace régional. Le regard vers demain ne s’enrichit-il pas également de ce que nous révèlent soudain les roches dans les strates du temps ?

Henri Lafitte, Chroniques insulaires

22 septembre 2019